dilluns, 24 de maig del 2021

Saisi par la majorité, le Conseil constitutionnel censure une partie de la proposition de loi sur les langues régionales (Le Monde)

 Le Monde - 22 mai 2021 (mandat per RPS)

Saisi par la majorité, le Conseil constitutionnel censure une partie de la proposition de loi sur les langues régionales

A un mois des élections régionales, c’est une décision du Conseil constitutionnel qui risque d’avoir des conséquences sur la campagne électorale dans certains territoires.

Vendredi 21 mai, l’institution a déclaré inconstitutionnels deux articles phares de la proposition de loi visant à promouvoir et protéger les langues régionales. L’enseignement immersif en langues régionales dans les écoles publiques et l’utilisation des signes diacritiques dans les documents d’état civil, comme le tilde, sont rayés du texte porté par l’ex-député (La République en marche, LRM) Paul Molac (Libertés et Territoires, Morbihan).

Le cabinet du ministre Jean-Michel Blanquer a apporté son concours à la rédaction de la saisine, à l’initiative de la députée des Yvelines Aurore Bergé

Adoptée définitivement à l’Assemblée nationale le 8 avril, la proposition de loi « historique », avait fait l’objet d’une saisine du Conseil constitutionnel à quelques heures de sa promulgation, le 22 avril, par 61 députés de la majorité (LRM, MoDem et Agir) alors qu’une majorité du groupe LRM avait voté en faveur du texte, contre la position officielle du groupe et du gouvernement.

Plus surprenant, le cabinet du ministre de l’éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, a apporté son concours à la rédaction de la saisine, à l’initiative de la députée (LRM) des Yvelines, Aurore Bergé. L’objet de la saisine visait à l’origine l’article 6 de la proposition de loi, sur le financement de l’enseignement des langues régionales par les communes. Celui-ci a pourtant été validé par l’institution. Dans un entretien à Ouest-France publié samedi, M. Blanquer nie être opposé à cette loi dans sa globalité. « J’ai au contraire soutenu le principe de cette loi dès le début. J’avais alors simplement indiqué qu’avoir la possibilité de l’enseignement immersif sans limite pouvait poser problème, affirme le ministre. Le Conseil constitutionnel rejette le mot immersifmais consacre le bilinguisme, ce dont les partisans de l’enseignement des langues régionales – dont je suis – doivent se réjouir. Le bilinguisme, qui consiste à travailler deux langues en même temps, est plus bénéfique que l’apprentissage en une seule langue. »

Face à la censure partielle de son texte, M. Molac dénonce, lui, « un militantisme anti-langue régionale » et réclame désormais au gouvernement de « rattraper la bêtise » en modifiant l’article 2 de la Constitution pour y intégrer la reconnaissance des langues dites « minoritaires ». Selon l’élu, la décision du Conseil constitutionnel rendrait illégal l’enseignement immersif suivi par quelque 15 000 enfants en France et dispensé depuis des décennies par certaines associations, comme Diwan, en Bretagne.

Dans un communiqué, l’association des Régions de France estime également que l’avis des « sages » est « incompréhensible », avant d’ajouter qu’« elles soutiendront toutes les initiatives pour faire évoluer notre Constitution ».

La colère des associations

Pour les associations et les élus de tous bords, mobilisés depuis le début du mandat d’Emmanuel Macron autour de la proposition de loi, la colère est nourrie contre le Conseil constitutionnel, mais aussi contre LRM et M. Blanquer.

« La censure de l’article sur l’enseignement immersif ne pourra rester sans conséquence pour ceux qui auront manigancé cette saisine. Ils ont montré leur hostilité aux langues régionales et devront en porter la responsabilité », tempête le sénateur (Les Républicains) des Pyrénées-Atlantiques, Max Brisson.

« Cette décision menace lourdement les fondamentaux garantissant le vivre-ensemble », précise M. Etchegaray

En Nouvelle-Aquitaine, dans le Pays basque, « l’émotion est forte », résume la sénatrice socialiste des Pyrénées-Atlantiques, Frédérique Espagnac. Comme les députés MoDem locaux Vincent Bru et Florence Lasserre, le président centriste (Union des démocrates et indépendants) de la communauté d’agglomération du Pays basque, Jean-René Etchegaray, dénonce « le mépris pour les territoires » et « le déni de la réalité de la vie de nombreuses familles » : « Cette décision menace lourdement les fondamentaux garantissant le vivre-ensemble. » Même constat pour François Bayrou, maire (MoDem) de Pau et ancien ministre de l’éducation nationale : « Des millions de Français ne l’accepteront pas, jamais, et j’en serai », a t-il annoncé sur Twitter.

Reste l’embarras des « marcheurs » en campagne, toujours en quête d’implantation locale. En Bretagne, notamment, cette décision pourrait affaiblir Thierry Burlot, candidat centriste soutenu par la majorité présidentielle, légèrement en tête dans les intentions de vote pour les régionales de juin, selon un sondage publié le 7 mai par Le Télégramme.

« Nous sommes très en colère envers Aurore Bergé et consorts, mais aussi contre Paul Molac, dont le texte était mal écrit. A force de vouloir bidouiller la loi, on sombre dans un parlementarisme poussé à l’absurde », juge Olivier Dulucq, directeur de campagne de M. Burlot. Les « marcheurs » sont persuadés que les électeurs démêleront les positions parisiennes de LRM des ambitions régionales.

Fond de crise sanitaire entre Paris et les régions

Les concurrents de la majorité présidentielle ne manqueront pas de s’en servir comme d’un argument électoral, dans un contexte politiquement tendu, sur fond de crise sanitaire, entre Paris et les régions.

« Il nous faut repartir à l’assaut du jacobinisme et redire combien notre République se renforcerait à accepter le terreau sur lequel elle s’est construite », assène Loïg Chesnais-Girard, président (Parti socialiste) du conseil régional de Bretagne et candidat à sa succession en juin. Le numéro deux de sa liste dans le Morbihan n’est autre que M. Molac.

L’équipe de Thierry Burlot martèle sa volonté de doubler le budget alloué aux langues régionales promis à Stéphanie Stoll, ex-présidente de Diwan et deuxième sur la liste du candidat centriste dans le département des Côtes-d’Armor.

Les élus de la majorité tentent aussi de désamorcer le contrecoup politique

Du côté de la région Grand-Est, les élus de la majorité tentent aussi de désamorcer le contrecoup politique de la décision du Conseil constitutionnel. La tête de liste de la majorité présidentielle et secrétaire d’état déléguée à l’insertion, Brigitte Klinkert, s’est empressée de réagir en apportant son soutien à l’enseignement des langues régionales. « Je continuerai à faire avancer cette cause et à convaincre tous ceux, dans les partis politiques, qui peuvent encore avoir des réticences », a t-elle insisté sur Twitter.

Chez LRM, cette saisine in extremis avait marqué une énième ligne de fracture. Quatre députés avaient demandé le retrait de leurs signatures sur la saisine, remettant en cause sa sincérité. Un point que le Conseil constitutionnel a tranché, arguant que la procédure avait été respectée. Christophe Castaner, le président du groupe LRM à l’Assemblée, a préféré souligner les « avancées majeures » de la proposition de loi, notamment la reconnaissance des langues régionales dans le code du patrimoine et la signalétique bilingue des lieux publics dans les régions concernées. « Nous nous réjouissons que la décision du Conseil constitutionnel renforce la portée de ce texte », a t-il déclaré.

Le groupe LRM va même jusqu’à lancer un appel à M. Blanquer « pour que des mesures (…) soient rapidement prises » afin de continuer à développer l’apprentissage des langues régionales.

Benjamin Keltz(Rennes, correspondance), Michel Garicoïx(Bayonne, correspondant) et Mariama Darame

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